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Guide de la couleur et de l'image imprimée
par Emmanuel Florio
A  r  t  i  c  l  e  s 

Introduction
Ecran/impression
La calibration
Numériser
Et le noir ?
Quelques Notions
A votre tour
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NUMÉRISATION

NUMÉRISER : TRANSFORMER DES INFORMATIONS OPTIQUES EN LANGAGE INFORMATIQUE.

Le périphérique qui assume cette tâche délicate est le SCANNER. (Il existe d'autres méthodes d'acquisition, comme les récents appareils de photographie numériques, dont la part dans la production reste -pour le moment- marginale.)
Les scanners rotatifs à l'usage des professionnels utilisent des pilotes et des interfaces sophistiqués dont l'apprentissage exige plusieurs semaines (personnellement, je l'estime à plusieurs mois, voire plusieurs années de pratique. Mais je suis un vieil emmerdeur...) Nous ne traiterons pas de ceux-là dans ces pages!
La nouvelle génération de scanner "à plat" disposent de pilotes qui offrent tous cette alternative: "mode standard" où les réglages sont réduits à leur plus simple expression, ou "mode expert" avec une batterie plus ou moins étendue d'options personnalisées. 

Heureusement, la procédure standard suffit sans problèmes à la majorité des numérisations (on a coutume, dans notre beau métier, de les appeler aussi "SÉLECTIONS"). Cadrer le document, indiquer l'agrandissement et la résolution, c'est suffisant. Et vous n'avez pas à vous soucier point par point des étapes décrites ci-dessous. N'allez cependant pas imaginer qu'elles soient ignorées: elles sont simplement mise en oeuvre automatiquement par le pilote de l'appareil.
Nobody's Perfect! Pas même l'analyse automatique de votre scanner. Vous vous trouverez forcément confrontés un jour ou l'autre avec des images avec lesquelles "ça marche pas...", vous ne disposerez pas non plus toujours de documents d'une qualité idéale, et vous voudrez les améliorer.
À ce moment, il vous faudra fouiller dans les tripes de l'image, pour en extirper le meilleur. Mieux vaudra alors être un peu familiarisé avec les concepts développés ci-dessous...
ENTRÉE DE BLANC / ENTRÉE DE NOIR

L'ENTRÉE DE BLANC DÉFINIT LE POINT LE PLUS CLAIR DE L'IMAGE NUMÉRISÉE PAR LE SCANNER.

Elle peut être déterminée automatiquement par le pilote de l'appareil, ou manuellement sur une zone désignée par l'opérateur. On comprendra que du choix, judicieux ou non, de cette première valeur de blanc dépendra la qualité de la sélection. 
Elle dessinera le premier détail perceptible d'une reproduction, mais elle en conditionne également la densité générale.
On n'entrera donc pas un blanc dans un éclat de lumière, ou une partie surexposée du document au risque d'assombrir l'image dans son ensemble. 
On n'entrera pas plus un blanc dans une zone trop dense du document au risque de "griller" les premiers détails de l'image, et de perturber son équilibre chromatique.

L'ENTRÉE DE NOIR DÉFINIT LE POINT LE PLUS SOMBRE DE L'IMAGE NUMÉRISÉE PAR LE SCANNER.

Elle peut être déterminée automatiquement par le pilote de l'appareil, ou manuellement sur une zone désignée par l'opérateur. On comprendra que du choix, judicieux ou non, de cette dernière valeur de noir dépendra la qualité de la sélection. 
On opère généralement l'entrée de noir dans une zone stable du document: la plupart du temps dans le bord noir d'un ekta correctement développé. 
On remarquera par contre que de composer arbitrairement le noir dans les valeurs sombres de l'image, en cas d'ektas mal développés ou surexposés, permet souvent de rétablir les valeurs de contraste et l'équilibre de la gradation du sujet original.
On conservera par contre, sauf rares cas particuliers, l'entrée de noir de l'analyse automatique lors de la sélection pour fac-similé d'illustrations en gouaches, aquarelles, fusains, etc.

voitureCette photo manque à l'évidence de contraste et de luminosité.
Survolez-la avec la souris : vous découvrez maintenant une image transformée!
Il n'aura fallu pour lui rendre son éclat que redéfinir logiquement le point blanc (le premier détail), et le point noir (le dernier détail) dans le sujet.

Ici, bien sûr, un outil de mesure qui donne instantanément et précisément les valeurs de point dans les quatre canaux CMYB est d'un secours précieux, pour ne pas dire incontournable... 
La plupart des applications de retouche numériques offrent une fonction HISTOGRAMME, qu'on peut schématiquement comparer à une "radiographie" de l'image.
La plage complète de l'histogramme représente les valeurs potentielles de la gamme de gris (ou de couleur, car l'histogramme peut s'appliquer à chaque canal de couleur séparé). Elle est chiffrée de 0 à 255. Les pics graphiques décrivent la densité et la répartition des pixels de l'image analysée, qui correspondent à chacune des 256 valeurs d'une numérisation en 8 bits.
Dans notre exemple, le premier état de l'image est reproduit par l'histogramme de droite : si la courbe de l'image dessine une masse homogène et cohérente, on remarque l'absence de valeurs dans les plages les plus claires et les plus sombres. C'est le profil caractéristique d'une prise de blanc et de noir inadaptée. On peut très simplement ajuster les valeurs avec les curseurs situés sous l'histogramme, et transformer ce profil en l'histogramme de gauche. C'est une méthode rapide (ce n'est pas celle que je conseille), mais peu précise. Au moins permet-elle de visualiser instantanément l'effet escompté. Il est plus opportun de procéder à une analyse et une correction chiffrée avec l'outil "pipette".

GRADATIONS

ON APPELLE GRADATION LE RAPPORT ENTE LA DENSITÉ COLORIMÉTRIQUE RÉELLE D'UN DOCUMENT, ET SA RESTITUTION EN VALEUR DE TRAME (exprimée en %) LORS DE LA SÉLECTION.






Une balance des gris parfaite est traditionnellement représenté dans un plan (où l'abscisse figure les valeurs de trame de 0% à 100%, et l'ordonnée les densités minimales et maximales du document) par une droite orientée à 45° . 
On peut modifier par gradation conjointe des quatre canaux CMYB la densité ou le contraste général d'une sélection. L'équilibre de la balance des gris ne sera pas affectée, mais on éclaircira l'image (en creusant la courbe), ou bien on saturera les couleurs (en gonflant la courbe).
On corrigera les dominantes parasites d'une sélection en modifiant séparément la gradation d'une ou plusieurs couleurs pour restituer une balance des gris cohérente: supprimer une dominante bleutée sur un visage, ou des reflets jaunes sur un coteau enneigé.
A l'inverse, on peut utiliser la fonction de gradation pour générer artificiellement une dominante qui rendra plus attrayante une sélection: ajouter un peu de soleil sur un paysage. 

danseuseVoila l'exemple d'une image envahie par une dominante indésirable.
Survolez, et découvrez la même image dont les gradations ont été corrigées pour retrouver la fraîcheur et le contraste du document original.

N'est-ce pas plus plaisant?

Vous avez tout à fait le droit de préférer la première version. Une correction de gradation ne doit pas être systématique. Certaines photographies très caractérisées risquent d'être dénaturées par des modifications intempestives (un coucher de soleil, une scène d'intérieur, une composition artistique par exemple...). Tout est affaire de logique, mais aussi de -bon- goût. 

courbesLes trois courbes ci-devant montrent les corrections appliquées à notre image. Les courbes originelles sont bien entendu de parfaites droites orientées à 45°.
Le cyan a seulement été gonflé d'environ 10% dans les demi-tons (c'est à dire qu'un point d'une valeur de 50% au départ sera reproduit à une valeur de 60%). Le magenta, gonflé également dans les demi-tons d'environ 5%, a été atténue de 5% dans les blancs. Le jaune, amputé de prés de 30% dans les blancs, a été accentué dans les ombres.
Deux remarques à cette gymnastique: L'action sur les courbes de gradation interagit inévitablement sur l'équilibre des point blanc et point noir.
Les modifications de gradations peuvent s'évaluer visuellement, on a cependant intérêt à les peser numériquement en référence à la balance des gris, car des nuances subtiles -de l'ordre seulement de 2 ou 3%- peuvent modifier notablement l'apparence d'une image.

CORRECTIONS DE COULEUR

CE SONT DES CORRECTIONS QUI INTERVIENNENT SUR LE RENDU DE COULEURS EXPRESSÉMENT DÉSIGNÉES PAR L'OPÉRATEUR(et uniquement sur celles-là), au stade de la sélection du scanner ou par un logiciel de retouche chromatique.






Elles permettent de modifier la saturation de la couleur pure, et l'incidence de la couleur complémentaire. On notera qu'une correction couleur est d'autant plus efficace qu'on opère sur une zone de référence proche de la couleur pure, et que l'indice de correction est d'autant plus faible: un indice de correction faible est extrêmement sélectif. Un indice de correction élevé aura un spectre d'action très étendu, et risque de provoquer des abérations chromatiques inopportunes, voire même d'altérer la balance des gris de la sélection.
On a intérêt, plutôt que de modifier uniquement la saturation ou la complémentaire d'une couleur, à les corriger en mouvement contraire avec des indices beaucoup plus faibles. On évite ainsi les distorsions indésirables, et on obtient des tons qui paraissent, en référence à la balance des gris, à la fois plus denses et plus frais.
Dans certains cas, il peut être intéressant de travailler sur le canal du noir, traité comme couleur complémentaire, pour mettre en valeur des tons très saturés et redessiner des volumes que la sélection quadrichromie a tendance à écraser.
Enfin un masque de sélection, employé conjointement aux fonctions de corrections couleurs permet d'isoler du reste de l'image des zones parfaitement délimitées, ou par le biais d'une gradation sélective de caractériser des tons trop peu tranchés pour qu'une correction couleur classique y soit opérante. 
 
Suivant que vous survolerez l'image d'un coté ou de l'autre, vous la verrez se transformer différemment.

Par le coté GAUCHE, la couleur des pêches va changer.

Par le coté DROIT, c'est le fond qui se modifiera. 

DEUX MÉTHODES DE CORRECTIONS DE COULEURS ONT ÉTÉ EMPLOYÉES.

La correction de couleur sélective a servi à rehausser les couleurs des pêches, en augmentant la proportion de magenta et de jaune dans les couleurs JAUNE et ROUGE (attention: rouge n'est pas magenta!...mais magenta 100%+ jaune 100%). Il s'avère souvent nécessaire de corriger conjointement les tonalités proches pour modifier uniformément la couleur d'un objet: BLEU et VIOLET, pour la mer ou le ciel, VERT et JAUNE pour l'herbe et les feuillages, etc. On procéde ainsi lorsque les tons sont bien différenciés.
La correction de couleur par masque a servi à modifier la tonalité du fond de la photographie. Même si l' oeil humain extrapole, induit en cela par la FORME de l'objet, la nuance comme un VERT, l'analyse densitométrique la décrit plutôt comme un gris à reflet jaune-verdâtre. La correction sélective est dans ce cas peu, ou pas active. En matérialisant un masque, à l'aide des multiples outils à notre disposition, on peut caractériser la zone suivant notre bon vouloir. Ici, c'est la fonction de gradation dans les demi-tons (moins magenta, plus cyan et jaune) qui s'est avérée pertinente.

D'accord. C'est de l'escroquerie... Mais vous ne vous imaginiez tout de même pas que les mannequins mirifiques qui s'étalent aux pages de vos magazines possèdent RÉELLEMENT ces corps de rêves aux lignes d'albâtre!
 
 
NUMÉRISER UNE IMAGE, C'EST D'ABORD L'ANALYSER.

Pour intervenir sur une image, il faut impérativement être capable de l'analyser. Lire les informations données par le pré-scan, et anticiper le résultat des éventuelles corrections: le "pifomètre" n'existe pas en gravure (ou seulement passée la barre des 100 000 sélections). En cas d'hésitation, une seule solution: peser le point blanc, le point noir, l'équilibre des gris, la densité des couleurs... et comparer avec une gamme de tons fiable.

Respectez l'ordre des interventions!
Entrée de blanc et de noir / Gradations / Corrections de couleurs, car elles sont interactives. Une gradation peut modifier le rendu des couleurs, et l'équilibre des blancs. Une entrée de blanc différente change la gradation. Une correction de couleur intempestive peut complétement dénaturer l'équilibre chromatique d'une image.

Et en dernier recours, malgré l'investissement de temps et d'argent, une épreuve de contrôle reste l'ultime garantie. Aujourd'hui, on rencontre souvent des annonceurs pensant économiser quelques centaines de francs en se passant d'épreuve contractuelle. "On verra bien assez au passage en machine!". On voit surtout des clients déçus, des imprimeurs stressés, des photograveurs découragés. Et surtout, surtout, aucun recours à l'horizon: car pour pouvoir faire état de sa bonne foi, une épreuve signée du donneur d'ordre (le fameux "BON À TIRER") est toujours indispensable....